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Synopsis du conte... || Ce conte fait ± 6¾ pages (19748 caractères)
Pays ou culture du conte : France.

Recueil : Contes du Magasin des enfants

Belote et Laidronette

Jeanne-Marie Leprince de Beaumont (1711-1780)

Il y avait une fois un seigneur qui avait deux filles jumelles, à qui l’on avait donné deux noms qui leur convenaient parfaitement. L’aînée, qui était très belle, fut nommée Belote, et la seconde, qui était fort laide, fut nommée Laidronette. On leur donna des maîtres, et jusqu’à l’âge de douze ans, elles s’appliquèrent à leurs exercices ; mais alors leur mère fit une sottise, car sans penser qu’il leur restait encore bien des choses à apprendre, elle les mena avec elle dans les assemblées. Comme ces deux filles aimaient à se divertir, elles furent bien contentes de voir le monde, et elles n’étaient plus occupées que de cela, même pendant le temps de leurs leçons ; en sorte que leurs maîtres commencèrent à les ennuyer. Elles trouvèrent mille prétextes pour ne plus apprendre ; tantôt il fallait célébrer le jour de leur naissance une autre fois elles étaient priées à un bal, à une assemblée, et il fallait passer le jour à se coiffer ; en sorte qu’on écrivait souvent des cartes aux maîtres, pour les prier de ne point venir. D’un autre côté les maîtres, qui voyaient que les deux petites filles ne s’appliquaient plus, ne se souciaient pas beaucoup de leur donner des leçons ; car dans ce pays, les maîtres ne donnaient pas leçon seulement pour gagner de l’argent, mais pour avoir le plaisir de voir avancer leurs écolières. Ils n’y allaient donc guère souvent, et les jeunes filles en étaient bien aises. Elles vécurent ainsi jusqu’à quinze ans, et à cet âge, Belote était devenue si belle, qu’elle faisait l’admiration de tous ceux qui la voyaient. Quand la mère menait ses filles en compagnie, tous les cavaliers faisaient la cour à Belote ; l’un louait sa bouche, l’autre ses yeux, sa main, sa taille ; et pendant qu’on lui donnait toutes ces louanges, on ne pensait seulement pas que sa sœur fût au monde. Laidronette mourait de dépit d’être laide, et bientôt elle prit un grand dégoût pour le monde et les compagnies, où tous les honneurs et les préférences étaient pour sa sœur. Elle commença donc à souhaiter de ne plus sortir : et un jour qu’elles étaient priées à une assemblée, qui devait finir par un bal, elle dit à sa mère, qu’elle avait mal à la tête, et qu’elle souhaitait de rester à la maison. Elle s’y ennuya d’abord à mourir, et pour passer le temps, elle fut à la bibliothèque de sa mère, pour chercher un roman, et fut bien fâchée de ce que sa sœur en avait emporté la clef. Son père aussi avait une bibliothèque, mais c’étaient des livres sérieux, et elle les haïssait beaucoup. Elle fut pourtant forcée d’en prendre un : c’était un recueil de lettres, et en ouvrant le livre, elle trouva celle que je vais vous rapporter :

Vous me demandez d’où vient que la plus grande partie des belles personnes sont extrêmement sottes et stupides ? Je crois pouvoir vous en dire la raison. Ce n’est pas qu’elles aient moins d’esprit que les autres, en venant au monde ; mais c’est qu’elles négligent de le cultiver. Toutes les femmes ont de la vanité ; elles veulent plaire. Une laide connaît qu’elle ne peut être aimée à cause de son visage ; cela lui donne la pensée de se distinguer par son esprit. Elle étudie donc beaucoup, et elle parvient à devenir aimable, malgré la nature. La belle, au contraire, n’a qu’à se montrer pour plaire, sa vanité est satisfaite : comme elle ne réfléchit jamais, elle ne pense pas que sa beauté n’aura qu’un temps ; d’ailleurs elle est si occupée de sa parure, du soin de courir les assemblées pour se montrer, pour recevoir des louanges, qu’elle n’aurait pas le temps de cultiver son esprit, quand même elle en connaîtrait la nécessité. Elle devient donc une sotte tout occupée de puérilités, de chiffons, de spectacles ; cela dure jusqu’à trente ans, quarante ans au plus, pourvu que la petite vérole, ou quelque autre maladie, ne viennent pas déranger sa beauté plus tôt. Mais quand on n’est plus jeune, on ne peut plus rien apprendre : ainsi, cette belle fille, qui ne l’est plus, reste une sotte pour toute sa vie, quoique la nature lui ait donné autant d’esprit qu’à une autre ; au lieu que la laide, qui est devenue fort aimable, se moque des maladies et de la vieillesse, qui ne peuvent rien lui ôter…

Laidronette, après avoir lu cette lettre qui semblait avoir été écrite pour elle, résolut de profiter des vérités qu’elle lui avait découvertes. Elle redemande ses maîtres, s’applique à la lecture, fait de bonnes réflexions sur ce qu’elle lit, et en peu de temps, devient une fille de mérite. Quand elle était obligée de suivre sa mère dans les compagnies, elle se mettait toujours à côté des personnes en qui elle remarquait de l’esprit, et de la raison, elle leur faisait des questions, et retenait toutes les bonnes choses qu’elle leur entendait dire ; elle prit même l’habitude de les écrire, pour s’en mieux souvenir, et à dix-sept ans, elle parlait et écrivait si bien, que toutes les personnes de mérite se faisaient un plaisir de la connaître, et d’entretenir un commerce de lettres avec elle. Les deux sœurs se marièrent le même jour. Belote épousa un jeune prince qui était charmant, et qui n’avait que vingt-deux ans. Laidronette épousa le ministre de ce prince : c’était un homme de quarante-cinq ans. Il avait reconnu l’esprit de cette fille, et il l’estimait beaucoup ; car le visage de celle qu’il prenait pour sa femme, n’était pas propre à lui inspirer de l’amour, il avoua à Laidronette qu’il n’avait que de l’amitié pour elle : c’était justement ce qu’elle demandait, et elle n’était point jalouse de sa sœur qui épousait un prince, qui était si fort amoureux d’elle, qu’il ne pouvait la quitter une minute, et qu’il rêvait d’elle toute la nuit. Belote fut fort heureuse pendant trois mois ; mais au bout de ce temps, son mari, qui l’avait vue tout à son aise, commença à s’accoutumer à sa beauté, et à penser qu’il ne fallait pas renoncer à tout pour sa femme. Il fut à la chasse, et fit d’autres parties de plaisir dont elle n’était pas, ce qui parut fort extraordinaire à Belote ; car elle s’était persuadée que son mari l’aimerait toujours de la même force : et elle se crut la plus malheureuse personne du monde, quand elle vit que son amour diminuait. Elle lui en fit des plaintes ; il se fâcha ; ils se raccommodèrent : mais comme ces plaintes recommençaient tous les jours, le prince se fatigua de l’entendre. D’ailleurs Belote ayant eu un fils, elle devint maigre, et sa beauté diminua considérablement ; en sorte qu’à la fin, son mari, qui n’aimait en elle que cette beauté, ne l’aima plus du tout. Le chagrin qu’elle en conçut acheva de gâter son visage ; et comme elle ne savait rien, sa conversation était fort ennuyeuse. Les jeunes gens s’ennuyaient avec elle, parce qu’elle était triste ; les personnes plus âgées, et qui avaient du bon sens, s’ennuyaient aussi avec elle, parce qu’elle était sotte : en sorte qu’elle restait seule presque toute la journée. Ce qui augmentait son désespoir, c’est que sa sœur Laidronette était la plus heureuse personne du monde. Son mari la consultait sur les affaires, il lui confiait tout ce qu’il pensait, il se conduisait par ses conseils, et disait partout que sa femme était le meilleur ami qu’il eût au monde. Le prince même, qui était un homme d’esprit, se plaisait dans la conversation de sa belle-sœur, et disait qu’il n’y avait pas moyen de rester une demi-heure sans bâiller avec Belote, parce qu’elle ne savait parler que de coiffures, et d’ajustements, en quoi il ne connaissait rien. Son dégoût pour sa femme devint tel, qu’il l’envoya à la campagne, où elle eut le temps de s’ennuyer tout à son aise, et où elle serait morte de chagrin, si sa sœur Laidronette n’avait pas eu la charité de l’aller voir le plus souvent qu’elle pouvait. Un jour qu’elle tâchait de la consoler, Belote lui dit :

« Mais ma sœur, d’où vient donc la différence qu’il y a entre vous et moi ? Je ne puis pas m’empêcher de voir que vous avez beaucoup d’esprit, et que je ne suis qu’une sotte ; cependant quand nous étions jeunes, on disait que j’en avais pour le moins autant que vous. »

Laidronette alors raconta son aventure à sa sœur, et lui dit :

« Vous êtes fort fâchée contre votre mari, parce qu’il vous a envoyée à la campagne et cependant cette chose, que vous regardez comme le plus grand malheur de votre vie, peut faire votre bonheur, si vous le voulez. Vous n’avez pas encore dix-neuf ans, ce serait trop tard pour vous appliquer, si vous étiez dans la dissipation de la ville ; mais la solitude, dans laquelle vous vivez, vous laisse tout le temps nécessaire pour cultiver votre esprit. Vous n’en manquez pas, ma chère sœur ; mais il faut l’orner par la lecture, et les réflexions. »

Belote trouva d’abord beaucoup de difficultés à suivre les conseils de sa sœur, par l’habitude qu’elle avait contractée de perdre son temps en niaiseries ; mais à force de se gêner, elle y réussit, et fit des progrès surprenants dans toutes les sciences, à mesure qu’elle devenait aussi raisonnable : et comme la philosophie la consolait de ses malheurs, elle reprit son embonpoint, et devint plus belle qu’elle n’avait jamais été ; mais elle ne s’en souciait pas du tout, et ne daignait même pas se regarder dans le miroir. Cependant, son mari avait pris un si grand dégoût pour elle, qu’il fit casser son mariage. Ce dernier malheur pensa l’accabler, car elle aimait tendrement son mari ; mais sa sœur Laidronette vint à bout de la consoler.

« Ne vous affligez pas, lui disait-elle, je sais le moyen de vous rendre votre mari ; suivez seulement mes conseils, et ne vous embarrassez de rien. »

Comme le prince avait eu un fils de Belote, qui devait être son héritier, il ne se pressa point de prendre une autre femme, et ne pensa qu’à se bien divertir. Il goûtait extrêmement la conversation de Laidronette, et lui disait quelquefois, qu’il ne se remarierait jamais, à moins qu’il ne trouvât une femme qui eût autant d’esprit qu’elle.

« Mais, si elle était aussi laide que moi, lui répondit-elle, en riant.

— En vérité, madame, lui dit le prince, cela ne m’arrêterait pas un moment : on s’accoutume à un laid visage, le vôtre ne me paraît plus choquant, par l’habitude que j’ai de vous voir ; quand vous parlez, il ne s’en faut de rien que je ne vous trouve jolie ; et puis, à vous dire la vérité, Belote m’a dégoûté des belles, toutes les fois que j’en rencontre une, stupide, je n’ose lui parler, dans la crainte qu’elle ne me réponde une sottise. »

Cependant, le temps du carnaval arriva, et le prince crut qu’il se divertirait beaucoup, s’il pouvait courir le bal sans être connu de personne. Il ne se confia qu’à Laidronette, et la pria de se masquer avec lui ; car, comme elle était sa belle-sœur, personne ne pouvait y trouver à redire, et quand on l’aurait su, cela n’aurait pu nuire à sa réputation ; cependant, Laidronette en demanda la permission à son mari, qui y consentit, d’autant plus volontiers qu’il avait lui-même mis cette fantaisie en tête du prince, pour faire réussir le dessein qu’il avait, de le réconcilier avec Belote. Il écrivit à cette princesse abandonnée de concert avec son épouse, qui marqua en même temps à sa sœur, comment le prince devait être habillé. Dans le milieu du bal, Belote vint s’asseoir entre son mari et sa sœur, et commença une conversation extrêmement agréable avec eux : d’abord, le prince crut reconnaître la voix de sa femme ; mais elle n’eut pas parlé un demi-quart d’heure, qu’il perdit le soupçon qu’il avait eu au commencement. Le reste de la nuit passa si vite, à ce qu’il lui sembla, qu’il se frotta les yeux quand le jour parut, croyant rêver, et demeura charmé de l’esprit de l’inconnue, qu’il ne put jamais engager à se démasquer : tout ce qu’il en put obtenir, c’est qu’elle reviendrait au premier bal avec le même habit. Le prince s’y trouva des premiers ; et quoique l’inconnue y arrivât un quart d’heure après lui, il l’accusa de paresse, et lui jura qu’il s’était beaucoup impatienté. Il fut encore plus charmé de l’inconnue cette seconde fois que la première, et avoua à Laidronette qu’il était amoureux comme un fou de cette personne.

« J’avoue qu’elle a beaucoup d’esprit, lui répondit sa confidente ; mais si vous voulez que je vous dise mon sentiment, je soupçonne qu’elle est encore plus laide que moi : elle connaît que vous l’aimez, et craint de perdre votre cœur, quand vous verrez son visage.

— Ah ! madame, dit le prince, que ne peut-elle lire dans mon âme ! L’amour qu’elle m’a inspiré, est indépendant de ses traits : j’admire ses lumières, l’étendue de ses connaissances, la supériorité de son esprit, et la bonté de son cœur.
— Comment pouvez-vous juger de la bonté de son cœur ? lui dit Laidronette.
— Je vais vous le dire, reprit le prince, quand je lui ai fait remarquer de belles femmes, elle les a louées de bonne fois et elle m’a même fait remarquer avec adresse des beautés qu’elles avaient, et qui échappaient à ma vue. Quand j’ai voulu, pour l’éprouver, lui conter les mauvaises histoires qu’on mettait sur le compte de ces femmes, elle a détourné adroitement le discours, ou bien elle m’a interrompu, pour me raconter quelque belle action de ces personnes ; et enfin, quand j’ai voulu continuer, elle m’a fermé la bouche, en me disant qu’elle ne pouvait souffrir la médisance. Vous voyez bien, madame, qu’une femme qui n’est point jalouse de celles qui sont belles, une femme qui prend plaisir à dire du bien du prochain, une femme qui ne peut souffrir la médisance, doit être d’un excellent caractère, et ne peut manquer d’avoir un bon cœur. Que me manquera-t-il pour être heureux avec une telle femme, quand même elle serait aussi laide que vous le pensez ? Je suis donc résolu à lui déclarer mon nom, et à lui offrir de partager ma puissance. »

Effectivement, dans le premier bal, le prince apprit sa qualité à l’inconnue, et lui dit qu’il n’y avait point de bonheur à espérer pour lui, s’il n’obtenait pas sa main ; mais, malgré ces offres, Belote s’obstina à demeurer masquée, ainsi qu’elle en était convenue avec sa sœur. Voilà le pauvre prince dans une inquiétude épouvantable. il pensait comme Laidronette, que cette personne si spirituelle devait être un monstre, puisqu’elle avait tant de répugnance à se laisser voir ; mais quoiqu’il se la peignît de la manière du monde la plus désagréable, cela ne diminuait point l’attachement, l’estime, et le respect, qu’il avait conçus pour son esprit et pour sa vertu. Il était tout prêt à tomber malade de chagrin, lorsque l’inconnue lui dit :

« Je vous aime, mon prince, et je ne chercherai point à vous le cacher ; mais plus mon amour est grand, plus je crains de vous perdre, quand vous me connaîtrez. Vous vous figurez, peut-être, que j’ai de grands yeux, une petite bouche, de belles dents, un teint de lis et de roses ; et si par aventure j’allais me trouver des yeux louches, une grande bouche, un nez camard, des dents gâtées, vous me prieriez bien vite, de remettre mon masque. D’ailleurs, quand je ne serais pas si horrible, je sais que vous êtes inconstant : vous avez aimé Belote à la folie, et cependant vous vous en êtes dégoûté.

— Ah ! madame, dit le prince, soyez mon juge ; j’étais jeune, quand j’épousai Belote, et je vous avoue que je ne m’était jamais occupé qu’à la regarder, et point à l’écouter ; mais lorsque je fus son mari, et que l’habitude de la voir eut dissipé mon illusion, imaginez-vous si ma situation dut être bien agréable ? Quand je me trouvais seul avec mon épouse, elle me parlait d’une robe nouvelle qu’elle devait mettre le lendemain, des souliers de celle-ci, des diamants de celle-là. S’il se trouvait à ma table une personne d’esprit, et que l’on voulût parler de quelque chose de raisonnable, Belote commençait par bâiller, et finissait par s’endormir. Je voulus essayer de l’engager à s’instruire, cela l’impatienta ; elle était si ignorante, qu’elle me faisait trembler et rougir toutes les fois qu’elle ouvrait la bouche. D’ailleurs, elle avait tous les défauts des sottes : quand elle s’était fourré une chose dans la tête, il n’était pas possible de l’en faire revenir, en lui donnant de bonnes raisons car elle ne pouvait les comprendre. Encore, s’il m’avait été permis de me désennuyer d’un autre côté, j’aurais eu patience, mais ce n’était pas là son compte : elle eût voulu que le sot amour, qu’elle m’avait inspiré, eût duré toute ma vie, et m’eût rendu son esclave. Vous voyez bien qu’elle m’a mise dans la nécessité de faire casser mon mariage.
— J’avoue que vous étiez à plaindre, lui répondit l’inconnue ; mais tout ce que vous dites, ne me rassure point. Vous dites que vous m’aimez, voyez si vous serez assez hardi pour m’épouser aux yeux de tous vos sujets, sans m’avoir vue.
— Je suis le plus heureux de tous les hommes, puisque vous ne demandez que cela, répondit le prince ; venez dans mon palais avec Laidronette, et demain, dès le matin, je ferai assembler mon conseil, pour vous épouser à ses yeux. »

Le reste de la nuit parut bien long au prince, et avant de quitter le bal, s’étant démasqué, il ordonna à tous les seigneurs de la cour, de se rendre dans son palais, et fit avertir tous les ministres. Ce fut en leur présence qu’il raconta ce qui lui était arrivé avec l’inconnue ; et après avoir fini son discours, il jura de n’avoir jamais d’autre épouse qu’elle, telle que pût être sa figure. Il n’y eut personne qui ne crût, comme le prince, que celle qu’il épousait ainsi ne fût horrible à voir : quelle fut la surprise de tous les assistants, lorsque Belote s’étant démasquée, leur fit voir la plus belle personne qu’on pût imaginer ? Ce qu’il y eut de plus singulier, c’est que le prince, ni les autres, ne la reconnurent pas d’abord, tant le repos et la solitude l’avaient embellie ; on se disait seulement tout bas, que l’autre princesse lui ressemblait en laid. Le prince extasié, d’être trompé si agréablement, ne pouvait parler ; mais Laidronette rompit le silence, pour féliciter sa sœur du retour de la tendresse de son époux.

« Quoi ! s’écria le roi, cette charmante et spirituelle personne est Belote ? Par quel enchantement a-t-elle joint aux charmes de la figure, ceux de l’esprit et du caractère qui lui manquaient absolument ? Quelque fée favorable a-t-elle fait ce miracle en sa faveur ?

— Il n’y a point de miracle, reprit Belote, j’avais négligé de cultiver les dons de la nature ; mes malheurs, la solitude et les conseils de ma sœur, m’ont ouvert les yeux, et m’ont engagée à acquérir des grâces à l’épreuve du temps et des maladies.
— Et ces grâces m’ont inspiré un attachement à l’épreuve de l’inconstance », lui dit le prince en l’embrassant.

Effectivement, il l’aima toute sa vie avec une fidélité, qui lui fit oublier ses malheurs passés.

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- FIN -

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