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Le jour où naquit le petit Kamalama, un orage terrible ravageait la forêt. Les éclairs zébraient le ciel, la foudre frappait, les arbres tombaient. On dit qu'un destin sinistre guette l'enfant né au cours d'une telle tornade, et qu'il mourra avant qu'une année ne s'écoule, avant la nouvelle saison des pluies. Voilà pourquoi le sorcier Nkotsi passa toute la nuit à faire de la magie : il voulait conjurer le mauvais sort qui planait sur le nouveau-né. On considérait Nkotsi comme un puissant sorcier, réputé pour son art dans toute la contrée. Malheureusement, comme il fut le premier à répandre ces bruits, le pére de Kamalama ne lui faisait pas confiance. Aussi décida-t-il d'invoquer directement le Dieu du Feu en personne qui était l'arrière-grand-oncle de son oncle. Il lui adressa des prières ardentes pour qu'il sauve son fils. Le Dieu du Feu lui dit : «Je vais protéger ton enfant, mais je n'ai pas le pouvoir de contrarier le destin. Il ne mourra pas d'ici un an, avant la nouvelle saison des pluies et vivra heureux jusqu'à l'âge de quinze ans. C'est alors que Kamalama devra mourir. Après sa mort, il brillera comme une étoile dans le firmament.» Et il en fut ainsi. Kamalama était le plus beau et le plus courageux des adolescents du village. Tous l'aimaient et sa vie s'écoulait, heureuse et insouciante. Gonflé d'orgueil, le sorcier Nkotsi racontait à qui voulait entendre que sa puissante magie avait eu raison des desseins des dieux. Le Dieu du Feu fut très en colére contre Nkotsi. Plusieurs fois, il fut sur le point de le punir pour ses paroles sacrilèges mais le père de Kamalama parvint toujours à l'amadouer : «Puissant dieu, ne punis pas le sorcier. Il a fait tout ce qu'il a pu pour préserver mon fils du mauvais sort. Il ne peut pas savoir que c'est ta volonté et non ses sortilèges qui ont décidé du destin de Kamalama.» Quinze années passèrent. La réputation de la magie de Nkotsi parvint jusqu'au roi de ce pays. Il convoqua Nkotsi dans la capitale, auprès de lui. Celui-ci fut trés heureux de l'honneur que le roi lui faisait. Il s'en alla donc dans la grande ville, accompagné de Kamalama. En se présentant devant le souverain, Nkotsi ne se prosterna pas dans la poussière comme le faisaient tous les autres, mais resta debout. Le roi fut outré par tant d'audace : «Pourquoi ne te prosternes-tu pas, sorcier ?» «Je suis un trop puissant sorcier pour tomber dans la poussière devant toi, ô roi !» répondit Nkotsi. Le visage du roi s'assombrit : «Et qu'as-tu accompli de si exceptionnel pour te considérer comme un grand magicien ?» «Qu'ai-je accompli ? Ceci par exemple !» Nkotsi saisit la main de Kamalama : «Ce garçon est né le jour où une terrible tornade ravageait la forêt. Tu n'ignores pas, roi, qu'il était de ce fait condamné à mourir un an après, avant l'arrivée de la nouvelle saison des pluies. Malgré cela, moi, le plus grand sorcier de ce pays, j'ai réussi à obtenir, grâce à un charme puissant, qu'il reste en vie et qu'il soit beau et en bonne santé.» Le visage du roi restait sombre. Soudain, Kamalama qui n'avait pas encore le droit de prendre la parole devant les femmes, s'adressa à lui : «Ne le crois pas, ô roi ! Ce n'est pas lui qui m'a sauvé la vie, mais le Dieu du Feu en personne, arrière-grand-oncle de mon oncle. C'est au contraire mon père qui a sauvé la vie du sorcier dont la suffisance et l'orgueil l'auraient tué depuis longtemps.» Le roi entra dans une grande colère : «Comment osez-vous parler ainsi devant votre souverain ? Votre audace vous coûtera la vie à tous les deux !» Kamalama lui répondit : «Je sais que je vais mourir. Je dois mourir à quinze ans, et le sorcier Nkotsi mourra avec moi. Toi, orgueilleux roi, tu vas par contre vivre très longtemps, tourmenté par l'angoisse et la terreur !» Sur ce, Kamalama écarta ses bras et tomba en arrière comme terrassé par une lance. Le sorcier s'affaissa au même moment, les jambes coupées. Tout le monde fut saisi de frayeur, le roi lui-même tremblait comme une feuille. Le soir, il fit allumer de grands feux funéraires. Avant que les guerriers ne se mettent à danser autour des brasiers, de nouvelles étoiles apparurent dans le firmament. Les plus grandes formaient un jeune homme aux bras écartés, les plus petites un amas semblable à un cadavre recroquevillé. Montrant les étoiles, le roi s'exclama : «Kamalama Nkotsi !» Il s'enfuit, épouvanté. Depuis ce jour, la Croix du Sud est appelée dans cette contrée constellation Kamalama Nkotsi. |
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