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Il y avait une fois un nègre et sa femme qui demeurient dans un village au bord de l'Oyapok. Ils avaient une petite fille qui était bien la plus gentille enfant qu'on pût voir. Obéissante, sage, aimant ses parents de toute son âme, elle était la joie et l'orgueil de son père et de sa mère toute la famille vivait du produit d'un petit champ de manioc et de patates qui entourait leur case.
L'hiver étant venu, des pluies torrentielles firent déborder la rivière, et quand les eaux se retirèrent, toute la plaine au loin n'était plus qu'un amas de gravier et de pierres. La disette désola le pays. Dans la maison du nègre, il n'y eut plus bientôt un morceau de cassave; la provision de patates diminuait de jour en jour. — Après avoir causé bien des fois à voix basse de leur triste situation, après avoir bien pleuré, les pauvres gens résolurent d'aller perdre leur fille chérie dans les grands bois. Ils se mirent en route un matin. Tout le long du chemin, la mère et son homme marchaient lentement les yeux gros de larmes; la petite fille allait en avant cueillant les baies qu'elle trouvait aux buissons. Tout d'un coup, n'entendant plus causer ses parents, l'enfant appela : Maman ! Maman ! — Pas de réponse. — Hélas ! Pauvre petite, te voila perdue dans cette épaisse forêt. — Plus elle cherchait son chemin, plus elle s'égarait. — La nuit arriva; le feuillage était si épais qu'elle ne pouvait même pas voir pour se guider les étoiles ni la lune. Les bêtes féroces poussaient des hurlements terribles. L'enfant marcha, marcha toujours; ses petits pieds étaient en sang, ses dents claquaient de frayeur, elle succombait de faim et de fatigue. Bientôt cependant les arbres se firent plus rares; une lumière brilla au loin. L'enfant se dirigea vers la lueur. Enfin elle aperçut une cabane. Elle frappa à la porte. Au nom de la bonne Vierge, ouvrez-moi, s'écria-t-elle. — La porte s'ouvrit en grinçant. Une vieille Maman Diable toute ridée apparut sur le seuil. Tombez, tombez, gros potirons ! Puis elle avança sa pauvre vieille tête et reçut l'un après l'autre les trois gros potirons. Chaque fois, son corps pliait et ses genoux fléchissaient. Dès que l'enfant fut entré, elle demanda à manger. — Ouvre ce buffet, petite, tu trouveras deux plats. Dans l'un, il y a de la bonne viande et du bon poisson; dans l'autre, il y a que des os et des arêtes. Mets-les sur le feu, et quand ce sera cuit, tu me donneras la part que tu voudras. La petite alluma le feu, fit chauffer les deux plats et servit à Maman Diable le plat de viande et de poisson; elle garda pour elle les os et les arêtes. Quand le dîner fut fini, Maman Diable mena l'enfant à son lit. Demain, quand tu seras bien reposée, dit-elle, nous irons nous baigner à la rivière. — Avant de se coucher, l'enfant fit sa prière à genoux et remercia le petit Jésus de l'avoir sauvée de la nuit si noire et des méchantes bêtes. Dès qu'il fit jour, Maman Diable et l'enfant allèrent à la rivière. Quand elles eurent pris leur bain, Maman Diable dit à l'enfant : Petite, frotte-moi par tout le corps pour me nettoyer. — L'enfant regarda alors le dos de Maman Diable, il était couvert de rasoirs, de couteaux, de clous pointus, de morceaux de verre cassé; pourtant elle n'hésita pas et frotta de son mieux le dos et les vieux membres de Maman Diable. Bientôt ses mains furent tout en sang. Quand Maman Diable vit cela, elle s'écria : Tu es une bonne petite file, tu as eu pitié d'une pauvre vieille; donne-moi tes mains. L'enfant les lui tendit; alors elle lui cracha dans les mains et lui dit : Maintenant, frotte-toi. Aussitôt les blessures disparurent. A présent, ma fille, il faut que tu partes pour retrouver tes parents. Voilà trois œufs. Quand tu rencontreras un obstacle sur ta route, tu n'auras qu'à casser un œuf, l'obstacle disparaîtra. Je ne te recommande qu'une chose: ne t'arrête pas un instant, et si d'aventure des jeunes gens viennent à toi et te font des compliments, ne les écoute pas et poursuis ta route sans faire attention à leurs belles paroles. La petite embrasse alors Maman Diable, la remercia de sa bonté et partit. Après avoir marché quelque temps, elle arriva à une large rivière. Impossible de trouver un gué pour la traverser. Alors elle cassa son premier œuf. Un batelier parut sur la rive. Elle se mit à chanter : Passez-moi donc, ô batelier. Le batelier s'approcha, la fit monter dans son canot et la passa de l'autre côté de la rivière. — Merci, bon batelier, de votre complaisance. Mais la petite fille se souvenant des conseils de Maman Diable, ne détourna seulement pas la tête. Laissez-moi tranquille, dit-elle, j'ai promis de ne pas m'arrêter avant d'avoir retrouvé mes parents. — Elle poursuivit donc sa route et arriva dans la plaine. A peine l'œuf était-il brisé qu'au bout du village on vit arriver le vieux nègre et sa femme, tout couvert de haillons, maigres, haves et courbés par le chagrin et la misère. En revoyant leur fille, qu'ils croyaient perdue à jamais ils versèrent d'abondantes larmes et voulurent se jeter à ses pieds pour lui demander pardon de l'avoir abandonnée. Mais elle ne leur en laissa pas le temps, et, sautant à leur cou, elle les embrassa tendrement. — Ils furent ensuite proclamés les souverains du pays et vécurent heureux dans la suite avec leur fille. La nouvelle de cette aventure se répandit bien vite. Elle parvint dans le village où habitait jadis la bonne petite fille. — Tous leurs voisins furent enchantés; seuls un nègre et sa femme en conçurent une jalousie extrême. Ces gens avaient une fille méchante, acariâtre, tout le portrait de sa mère d'ailleurs. Mon enfant, suivez mon conseil; ne vous arrêtez pas en chemin avant d'avoir retrouvé vos parents; sinon il vous arrivera malheur. Quand vous rencontrerez un obstacle ou que vous désirerez quelque chose, cassez un des œufs, vous aurez toute satisfaction. Sans remercier seulement Maman Diable, qui avait été si bonne, l'enfant prit sa route. Parvenue à la rivière, le premier œuf cassé lui fit trouver le batelier qui la passa sur l'autre rive. — La montagne s'opposa ensuite à son passage. Rouge de plaisir et de vanité, l'enfant s'élança vers les jeunes garçons; mais à peine eut-elle franchi la route bordée de fleurs que la montagne se referma avec fracas et l'engloutit. Elle ne fut plainte que d'une seule personne: de la bonne petite fille. — Mesdemoiselles, que cette histoire vous serve de leçon ! Publié par Loys Bruyere en 1878. |
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- FIN -
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