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Après deux années d’absence, Champlain était revenu à Québec, qu’il avait fondé douze ans plus tôt. Cette fois, il amenait avec lui Mme de Champlain. Mme de Champlain avait vingt-deux ans et il y en avait dix qu’elle était mariée. Elle s’appelait Hélène Boulé et en son honneur, Champlain j avait donné le nom d’île Sainte-Hélène à l’île située en face de Montréal. Ce fut une joie générale à Québec, lorsque l’on revit le lieutenant-général que tout le monde avait tant regretté. Oh lui fit fête, ainsi qu’à sa jeune épouse. On les conduisit à la chapelle – la première construite en territoire canadien, et qui se trouvait là où, aujourd’hui, se rencontrent la rue Champlain et la rue Sous-le-Fort — et on y chanta un Te Deum. Puis, les habitants les accompagnèrent en cortège à leur habitation. Ce n’est pas sans mélancolie que Champlain revit cette maison, sa maison : elle lui apparut dans un triste état ; tout y était délabré, les toits à moitié emportés ; les murs, eux-mêmes, menaçaient de crouler. — Ma chère femme, dit le lieutenant-général, j’aurais voulu que vous eussiez un logement confortable. Hélas! le climat de ce pays est rude et les bâtiments que l’on entretient pas s’effondrent. Courageusement, la jeune épouse cacha sa déception. — Vous verrez, mon ami, comme nous serons bien ici. Pendant que vous vous occuperez des grands intérêts de la Nouvelle-France et de vos administrés, moi, je me consacrerai à améliorer notre logis. Champlain embrassa sa femme et l’entraîna dans le jardin, là où, en 1608, il avait semé les premiers grains qui furent confiés à la terre du Canada... Le pauvre jardin était aussi désolé que la maison. — De cela aussi je m’occuperai, dit Mme Champlain. Des sauvages étaient accourus, des Hurons. Ils se tenaient à distance, intimidés par cette belle Française. Mme de Champlain leur fit signe d’approcher. Elle leur parla doucement et, bien qu’ils ne pussent comprendre ses paroles, ils étaient émus par le charme de sa voix. Au bout de quelques instants, le lieutenant-général remarqua une agitation parmi les indigènes : ils échangeaient entre eux des paroles d’étonnement, plusieurs se jetèrent à genoux. Champlain qui connaissait la langue huronne demanda au plus âgé d’entre eux quelle, était la cause de ce trouble. Du doigt, le sauvage désigna Mme de Champlain, et il expliqua : — Comment se fait-il que ton épouse nous porte tous sur son cœur ? Le lieutenant-général éclata de rire. La jeune femme portait, suivant la mode du temps, un petit miroir pendu à son cou par un ruban et, dans ce miroir, les Hurons avaient reconnu leurs images. Champlain revenu, les colons se remirent avec plus d’entrain à l’ouvrage. Hélas! Leurs peines ne furent pas, récompensées. Il y eut plusieurs mauvaises récoltes, le bétail dépérit, à tel point qu’en 1628 la disette régna à Québec. Il fallut rationner, les habitants. On en fut bientôt réduit à sept onces de pois par jour. — Ne vous inquiétez pas, disait Champlain aux colons. En France on connaît nos besoins, nous ne tarderons pas à recevoir des vivres et aussi de la poudre, car nos magasins en sont fort dépourvus. Pour servir l’artillerie de Québec, il n’y avait, dans le fort, pas plus de cinquante livres de poudre à canon. Des navires français avaient été effectivement annoncés, mais il fallait six semaines, en comptant avec les vents les plus favorables, pour faire la traversée. Les Canadiens n’étaient pas gens à se désespérer. Ce que la culture ne donnait pas, on essayait de le demander à la chasse. On travaillait avec plus d’acharnement pour que la récolte prochaine fût meilleure. Un beau matin, deux coureurs algonquins se présentèrent à l’habitation de Champlain. Ils étaient extrêmement émus. — Des navires! des navires! balbutièrent-ils dès qu’ils eurent repris leur souffle. Les sauvages secouèrent la tête. — Non! Ce sont des ennemis ; ils ont débarqué au cap Tourmente ; ils ont tout brûlé, tout détruit, enlevé le bétail ; ils ont incendié la chapelle des Récollets ; pillé les calices et les ornements sacrés. C’étaient les Anglais en effet. Ils étaient commandés par deux huguenots de Dieppe, les frères Kertk. La guerre avait été déclarée, sans qu’on le sût encore à la Nouvelle-France, entre Louis XIII et le roi d’Angleterre. Le lieutenant-général réunit les habitants : — Nous allons être attaqués, dit-il, il faut immédiatement mettre la ville en état de défense, réparer nos retranchements, renforcer les portes. Pas un murmure ne s’éleva parmi ces hommes à demi affamés, débilités par les maladies, compagnes ordinaires de la disette ; néanmoins, le plus ancien des colons prit la parole : — Comment nous défendrons-nous sans poudre pour nos canons et sans nourriture pour nous-mêmes ? En cas de siège nous n’aurons même plus la ressource de la chasse dans les forêts. Tout Canadien, agriculteur, artisan ou chasseur de fourrures, se doublait d’un soldat, d’un charpentier et d’un maçon. Les colons qui avaient leurs habitations disséminées autour de Québec refluèrent dans la cité. On répara à la hâte les retranchements; on restaura les palissades; on amena aux endroits convenables les canons, bien que l’on sût que, faute de munitions, ils ne seraient d’aucune utilité. A peine avait-on fini que l’on vit apparaître, au bout de l’île d’Orléans, une chaloupe qui naviguait vers la ville. Les occupants de la chaloupe furent reçus : des Basques prisonniers chargés d’un message de David Kertk, l’un des deux frères. On lisait notamment dans ce document : «... Je vous informe que j’ai obtenu mission du roi de la Grande-Bretagne, mon très honoré seigneur et maître, de prendre possession de ces pays, et, pour cet effet, nous avons à nos ordres dix-huit navires ... J’avais d’abord songé à aller vous trouver moi-même, mais j’ai cru qu’il valait mieux ravager les cultures et me saisir du bétail qui est au cap Tourmente sachant que, quand vous serez privés de vivres, j’obtiendrai plus facilement de vous ce que je désire. Conséquemment, voyez ce que vous avez à faire, et si vous désirez me rendre la ville ou non. J’aimerais mieux que ce fût de bon gré que de force. » Le lieutenant-général répliqua aux envoyés de Kertk : — Allez dire à ceux qui vous mandent que, s’ils ont envie de nous voir, ils approchent. Nous avons tout ce qu’il faut pour les recevoir ; c’est-à-dire des munitions en abondance, des grains, des pois, des fèves, sans compter les viandes fumées et salées, Les Basques rapportèrent cette réponse aux frères Kertk. Ceux-ci, convaincus qu’ils auraient affaire à forte partie, que le siège serait long et difficile, se rembarquèrent et firent voile pour l’Angleterre. Ce fier mensonge avait sauvé Québec. |
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Biographie et autres contes de Charles Quinel. Pays : Canada | Corriger le pays de ce conte.Mots-clés : Anglais | Champlain | colons | disette | Français | frères Kertk | Huron | mensonge | Nouvelle-France | Québec | Retirer ou Proposer un mot-clé pour ce conte. Proposer un thème pour ce conte. Signaler que ce conte n'est pas dans le domaine public et est protégé par des droits d'auteurs. © Tous les contes | Hébergé par le RCQ.
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