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La guerre n’était pas déclarée entre la France et l’Angleterre en cette année 1754 et cependant, les hostilités étaient continuelles entre les Canadiens et les colonies britanniques de l’Amérique. L’Acadie, ce prolongement du Canada, était tombée entre les mains anglaises. Les colons y avaient été emprisonnés et déportés en masse; leurs bestiaux avaient été enlevés, leurs maisons ruinées et les terres qu’ils avaient arrosées de leur sang et de leur sueur confisquées. Ceux qui avaient voulu résister, qui s’étaient tapis dans les forêts, étaient traqués comme des loups. Leurs refuges étaient encerclés et la famine finissait par les obliger à sortir des bois. De ce côté, tout était dit. La paix d’Aix-la-Chapelle avait, pour le reste du pays, délimité les frontières; cela n’empêchait pas les incursions fréquentes des Anglo-Américains. Sur l’Ohio, les autorités de la Nouvelle-France firent ériger une ligne de petits fortins dans le but de protéger le territoire. La principale redoute était le fort Duquesnes où commandait M. de Contrecœur. Au fort Duquesnes, la garnison respirait une atmosphère de perpétuel qui-vive. Elle était instruite des mouvements suspects des troupes britanniques. De temps à autre, sur une rumeur plus précise apportée par des indigènes amis, on s’enfermait derrière les retranchements; on prévenait les colons des environs qui venaient se mettre à l’abri, amenant leurs familles, leurs serviteurs et leurs bestiaux. La menace passée, avec cette insouciance qui fait le fond du caractère français, chacun repartait vers ses pénates. Les colons se remettaient à la chasse, à la culture, à l’élevage. Une nouvelle alerte fut plus chaude que les précédentes. Ce n’était plus un groupe de partisans, ni un noyau de colons anglais assistés de sauvages dont l’approche était annoncée; il s’agissait d’une véritable armée de milices virginiennes commandée par des officiers de l’armée régulière. Après avoir pris les dispositions habituelles, M. de. Contrecœur fit venir un jeune lieutenant, M. de Villiers de Jumonville, frère d’un officier supérieur canadien. — Monsieur, lui dit-il, je connais votre sang-froid; je sais que vous restez calme, quelles que soient les conjonctures. Voici ce que vous axez à faire : vous vous porterez au-devant des Anglo-Américains et, quand vous serez en vue de leurs troupes, vous vous mettrez sous la protection du drapeau parlementaire et vous leur lirez cette sommation d’avoir à déguerpir et à vider le territoire de la colonie. Je ne saurais assez vous répéter que nous ne devons, sous aucun prétexte, prendre figure d’agresseurs et qu’il nous est enjoint par la Cour de Versailles de faire tout notre possible pour maintenir la paix; si l’on peut appeler paix l’état dans lequel nous vivons! Jumonville, muni du document qui lui était confié, prit avec lui une trentaine d’hommes et partit dans la direction de l’ouest. Il chevaucha pendant plusieurs jours à travers les vastes terrains désertiques, par les forêts et les prairies. Un matin, comme il venait de lever le camp, il se trouva en présence de l’avant-garde anglo-américaine. Le lieutenant déploya le drapeau parlementaire, fit exécuter par son trompette la sonnerie d’usage et s’avança à découvert avec sa petite escorte. Parvenu à portée de la voix, Jumonville fit halte, sortit le manifeste de M. de Contrecœur et commença à le lire. Il n’avait pas dépassé les premières lignes du texte que les Anglo-Américains, en poussant des cris furieux, se précipitèrent sur lui. Il fut jeté à has de son cheval et son corps transpercé de plusieurs coups de baïonnette. Avant que ses hommes aient pu songer à le défendre, neuf d’entre eux mordaient la poussière et les autres, ligotés, étaient emmenés prisonniers. Celui qui commandait la troupe britannique était le colonel George Washington. *** Ce meurtre, exécuté au mépris du droit des gens, ne resta pas impuni. Washington et ses soldats s’étaient enfermés dans un fortin fait de palissades qu’ils avaient établi à Monongahéla. Le frère de M. de Jumonville, à la tête de six cents miliciens, les attaqua. Les Britanniques furent vaincus et subirent une humiliante capitulation qui ne leur laissait que la vie sauve. Cette victoire canadienne, inscrite dans les annales de la Nouvelle-France, y est célèbre sous le nom de bataille de Monongahéla, que les Canadiens du temps prononçaient « Malengueulé ». |
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Biographie et autres contes de Charles Quinel. Pays : Canada | Corriger le pays de ce conte.Mots-clés : 1754 | Acadie | colon | Contrecoeur | drapeau parlementaire | George Washinton | Jumonville | Nouvelle-France | Retirer ou Proposer un mot-clé pour ce conte. Proposer un thème pour ce conte. Signaler que ce conte n'est pas dans le domaine public et est protégé par des droits d'auteurs. © Tous les contes | Hébergé par le RCQ.
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